AccueilSociétéAu secours ! Mon préfet se prend pour un psychiatre…

Au secours ! Mon préfet se prend pour un psychiatre…

Chronique de Patrice Leroux

Il n’y a pas si longtemps, l’Union soviétique finissante utilisait des mêmes méthodes d’emprisonnement psychiatrique à tout va contre ses opposants issus de tout horizon imaginable autant qu’imaginaire  ; en effet, le placement forcé en soins psychiatriques paraissait plus « présentable » aux médias bovins comme l’inénarrable Pravda que la seule brutalité « ordinaire » de la précédente époque stalinienne, déjà passée de mode sous la bienveillante stagnation brejnevienne.
Et la quarantaine de commande fut un énorme succès médical puisqu’il y avait foule de « déséquilibrés mentaux » à l’hôpital. Pour une fois, les moyens financiers et le personnel n‘y manquaient pas…

Par lâcheté et autoritarisme « hiérarchiques », la misérable procédure d’internement à la chaîne pour déraison politique ou sociale est toujours d’actualité dans la prétendue « Patrie des Droits de l’Homme et du Citoyen », où nous gisons désespérés en attendant la mort – Elle seule libère à jamais de ce monde psychotique…

De fait, vraisemblablement, certains préfets et sous-préfets, névrosés par les quotas oppressifs de notre République d’apparat, auraient fait une sublime carrière dans le regretté Bloc de l’Est.
Technocrates experts dans l’âme damnée, ces robots en connaissent toutes les ficelles perverses pour faire régner l’ordre totalitaire en place ; l’attitude tyrannique de nos geôliers par vocation étend son empire sur notre morne quotidien, au lieu du seul et nécessaire maintien de l’Ordre public : ce dernier concept est un vieux principe complément dépassé en nos jours « néolibéraux », où règne l’efficacité enchantée du « vite fait, bien fait », car il visait uniquement à entretenir la paix commune avec un minimum de sagesse et de patience.

Néanmoins, il y a quelque raison de se rassurer selon la version des sages dignitaires qui nous gèrent comme des animaux domestiques et autres canaris en cage.
Selon leur verbiage brodé en volapük, la mésaventure de l’ingénieur outragé (parfaitement oubliable par eux-mêmes dans leur Olympe éthérée de décisionnaire mécanique autant que sériel) n’était pas qualifiée de vulgaire mise en boîte et sous silence d’un rebelle inopportun  ; sur leurs papiers discrets et inaccessibles aux investigations surnuméraires par des enquêteurs gênants venus de « l’extérieur », l’administration française appelle cela « régler les problèmes en interne » – La gestion infâme est toujours transcrite sur leurs divins formulaires avec une pudeur religieuse empreinte de mutisme, laquelle est d’ailleurs d’une certaine délicatesse en un sens.
Par nécessité d’enrobage impliqué par la communication administrative, les présents termes sont très bien choisis car user d’un tel langage pesant d’amphigouris informes autant qu’obscurs est plus pratique et rapide qu’agir simplement en être humain dans les faits.
Voilà bien la sublime justice des dieux…

En ces temps actuels de répression délirante, on préfère faire passer les victimes pour des fous  ; tout du moins, quand les cyborgs aux ordres diligents de leurs maîtres préfectoraux ne les éborgnent pas à coups de matraque ou de lanceur de balle.
Ainsi la démocratie rêvée meurt par excès de zèle bureaucratique et de coercition policière.
Au final, les vrais cinglés sont ceux qui dirigent l’asile national et, malheureusement, ils sont très méchants…

Amis épris de justice, soignez-vous bien au lieu d’attendre que nos gardiens en képi impartial veillent à votre santé à votre place.
Pour reprendre la formule d’Anthony Burgess, un fameux écrivain britannique, lesdits docteurs sont malades !


Les propos tenus dans les tribunes n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs.

Les derniers articles