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Crise au Chili : entretien avec une étudiante chilienne

Près d’un mois après le début de la fronde sociale, de nouvelles manifestations ont eu lieu, mardi 12 novembre, au Chili pour maintenir la pression sur le gouvernement du président conservateur Sebastián Piñera, contre les inégalités socio-économiques.

Nous sommes allés à la rencontre de Camila Gallardo, étudiante chilienne, ayant participé aux manifestations à Concepción, la seconde ville du pays.


Ecoh – Bonjour Camila, peux-tu te présenter ?

Camila Gallardo – J’ai 24 ans et j’étudie en France depuis 4 ans. Je suis revenue dans mon pays pendant 4 mois pour profiter de ma famille. Deux semaines après avoir atterri au Chili, les manifestations ont commencé suite à l’augmentation systématique du prix du ticket de métro à Santiago, mais le problème est bien plus profond. Les Chiliens ont subi pendant 30 ans des inégalités sociales, culturelles et politiques de la part des différents gouvernements, de gauche comme de droite. Aucun gouvernement n’a pu répondre aux besoins primaires de la société chilienne, tels qu’une éducation gratuite pour tous, un meilleur système de santé, ou encore l’augmentation du salaire minimum.

J’ai participé aux manifestations à Concepción, ma ville natale. Depuis 4 semaines il y a des manifestations tous les jours dans différents quartiers de la ville, l’unification des différentes classes sociales se voit dans chaque manifestation, l’ensemble du peuple chilien s’est uni pour lutter. 

Malheureusement, le gouvernement prend énormément de temps pour chercher des solutions, les manifestations pacifiques sont réprimées violemment par la police. Ils tirent pendant les manifestations pacifiques sur des familles, des personnes âgées et des enfants.

Il n’y a aucun respect des droits de l’homme…  plus de 100 personnes ont déjà perdu la vue, 40 sont mortes, des gens sont torturés, kidnappés, et le gouvernement ne donne aucune réponse face à cette répression ultra-violente.

Personnellement, je peux dire que je fais partie des privilégiés qui ont pu avoir une éducation privée, en France.  L’éducation c’est un droit et au chili ce droit n’existe pas.

Si je serais restée au Chili pour les études, j’aurais dû demander un crédit universitaire et j’aurais passé ma vie à le rembourser. Ici l’éducation n’est pas un droit, c’est un privilège. 

Lire aussi : Chili : les limites de l’ultralibéralisme

Qu’est-ce qui a déclenché le soulèvement du peuple chilien ?

Des salaires misérables, le manque d’argent pour l’éducation et la santé, la hausse de l’électricité, la surexploitation des ressources naturelles, etc.

Bref, l’inégalité entre les riches et les pauvres causée par un système néolibéral poussé à l’extrême.

Confronté à une mobilisation historique, le président Sebastián Piñera a mis fin à l’état d’urgence et annonce des mesures, comme le remaniement de son gouvernement. Pourtant, les manifestations continuent, pourquoi ?

Tout simplement, car il n’a donné aucune réponse à nos exigences. Le peuple demande une nouvelle constitution, car celle d’aujourd’hui a été créée par la dictature de Pinochet en 1973 !

Nous demandons également l’augmentation du salaire minimum, une éducation gratuite, une santé gratuite (des gens meurent dans les hôpitaux en attendant un rendez-vous).  L’eau a été privatisée, l’électricité aussi, tout est excessivement cher.

Le chili s’est réveillé et cette lutte sociale ne va pas s’arrêter avant que le président Piñera donne de vraies solutions à un peuple qui a dû supporter de longues années de précarité. 

Les pays démocratiques doivent nous aider à faire respecter les droits humains ! Des mineurs sont en prison, des manifestants sont torturés, des manifestantes sont violées … Nous avons besoin de l’aide internationale pour faire cesser cette violence.


Entretien réalisé par R.L pour Ecohmag

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